
Au moment où la capital économique du Burundi fait face à l’épidémie de choléra, il y a lieu de revenir les causes afin de concrétiser des stratégies solides de riposte et de prévention. Pour y arriver, il faudra libéraliser les services d’assainissement de base et faciliter l’accès à l’eau potable pour tous.
Un assainissement insuffisant est associé à la transmission de maladies diarrhéiques, telles que le choléra et la dysenterie, ainsi que d’autres maladies comme la typhoïde, l’infestation par des vers intestinaux (helminthiases) et la poliomyélite. Au Burundi, l’accès à l’assainissement de base n’atteint que 33% dans les zones urbaines et tombe à 13% dans les régions rurales et 40% n’as pas accès à l’eau potable.Distribuer par la Régie de Production et de Distribution d’eau et d’électricité (REGIDESO), l’eau potable est entièrement gérée par cette institution publique. En raison du faible investissement, elle n’arrive pas à couvrir le besoin. Dans plusieurs quartiers de Bujumbura, la distribution de l’eau alterne avec des coupures et dans certaines localités les robinets sont secs, reçoivent l’eau une journée ou quelques heures environs dans trois jours. Faut-il alors impliquer les investissements privés pour combler les lacunes ? Ou dans la prophylaxie ?
Un saut au 19ème siècle,…
Le choléra est vu comme le moteur de réformes sanitaires capitales en matière de distribution d’eau et de canalisations, qui ont été systématiquement mises en œuvre dans de nombreuses villes européennes à partir des années 1870. Avec le choléra pour argument, les municipalités ont fourni des prestations techniques et financières d’avant-garde.Max von Pettenkofer, le premier titulaire d’une chaire d’hygiène à Munich, a souligné dans son « Hygiène expérimentale » l’importance des actes écologiques : puisque les miasmes causés par la pourriture et la décomposition des sols humides sont à l’origine d’épidémies, le choléra pourrait être stoppé par le drainage des sols, c’est-à-dire l’assainissement. Cette thèse a incité les villes à prendre des mesures prophylactiques, qui promettaient à leur tour des retombées économiques. Les infrastructures sanitaires sont désormais considérées comme essentielles au fonctionnement d’une ville contemporaine, alors que les interventions traditionnelles de l’État comme la quarantaine apparaissaient contre-productives dans une économie moderne basée sur le libre-échange de biens et de services. Selon Pettenkofer, l’arrêt du commerce était un plus grand mal que le choléra lui-même.
Cas d’étude pour le BurundiDans la description de son économie du « capital humain », Pettenkofer souligne que les vies sauvées grâce aux mesures sanitaires et les jours de maladie épargnés dépassent de loin le coût des investissements dans les infrastructures. Même si son approche a ensuite été de plus en plus remplacée par la bactériologie de Robert Koch, centrée sur l’agent pathogène dans l’eau, les calculs coûts-bénéfices devaient à l’avenir façonner la vision des épidémies.
Dans le cas de Hambourg, des dommages estimés à 430 millions de marks ont été évités par la suite grâce à la modeste dépense de 22,6 millions de marks pour une station d’épuration équipée d’un système de filtrage l’année suivante. Des quartiers ont en outre été assainis et d’autres mesures d’hygiène mises en œuvre. La ville ayant depuis lors été épargnée par de nouvelles vagues de choléra, on peut conclure que cette grande épidémie a accéléré sa transformation en une métropole commerciale moderne.